À nous l’Alaska!
Le lendemain, on lève le camp vite fait. Ou plutôt, on se fait chasser par ces maudites bestioles ailées (vous devez en avoir marre, alors promis, j’arrête d’en parler). Aujourd’hui, on doit se rendre à la frontière de la Colombie-Britannique pour dormir au dernier camping territorial et nous rapprocher du sentier de randonnée Samuel Glacier. Pas grand-chose d’intéressant, le plus gros événement de la journée étant que nous avons appris qu’à Haines Junction, il n’y a pas de lave-auto. Impossible de rendre Étienne à peu près présentable. On s’en occupera au prochain arrêt. En attendant, on va marcher! Une vingtaine de kilomètres aller-retour pour une magnifique vue : ça valait la peine.


Après une bière de récompense en plein milieu d’un parking en bitume sans arbres et en plein vent (je ne dis pas pourquoi, vous avez compris), direction Haines et l’Alaska. Ça faisait longtemps que nous voulions aller à Haines. Nous y avions bien passé une journée en août dernier, mais un dimanche et sans voiture, notre passage avait été plutôt frustrant. Cette fois, nous avons tout ce qu’il faut pour en profiter!
Nous commençons par chercher des douches. Après avoir marché 20 km dans une chaleur torride, il nous faut bien ça. Surtout que la douche n’a pas été notre activité principale depuis le début des vacances : une en sept jours, il fallait y passer. Une fois n’est pas coutume, nous campons dans un RV park, ou camping plus ou moins réservé aux camping-cars, donc pas d’emplacement délimité, du gravier au sol, un parking de supermarché, quoi. Sauf que dans ces trucs-là, il y a des douches et des toilettes avec de l’eau. Et puis nous ne sommes pas si mal tombés, nous avons vue sur la mer. Et comme les gens qui campent en gros VR ont tout le luxe à l’intérieur, ils restent dans leur véhicule, c’est super calme, et on peut profiter du paysage en toute tranquillité. En plus, il fait beau et chaud : le bonheur!


Le lendemain, nous partons à l’assaut de l’office de tourisme. Notre plan est de passer quelques jours à Haines, puis de prendre un traversier jusqu’à Juneau, la capitale, deux jours plus tard. On nous indique le camping d’état et le terminal maritime, où nous nous arrêtons en passant pour réserver nos billets. Et là, problème : le traversier que nous pensions prendre le surlendemain est plein. Il y en a un qui part aujourd’hui, mais il est plein aussi. Et pour le retour, ceux qui ne sont pas pleins ne nous permettront pas de passer suffisamment de temps en ville si nous partons avec le prochain sur lequel il reste de la place. Si nous n’allons pas à Juneau, nous perdrons la fin des vacances, car les distances ne sont pas suffisantes pour faire grand-chose aux alentours en si peu de temps. Alors on change les plans : on se met sur la liste d’attente pour partir aujourd’hui (septièmes, ça peut marcher) et réservons le retour à une date qui nous convient, le 4 juillet – fête nationale des États-Unis. Nous aurons ainsi suffisamment de temps pour profiter de la capitale et des environs, et passerons du temps à Haines au retour.
Nous avons de la chance, ça fonctionne. C’est parti pour 4 h 30 de traversée. Nous arrivons en fin d’après-midi et nous rendons directement au camping. Et là, on hallucine. Les États-Unis sont vraiment surprenants. On y trouve les deux extrêmes, le pire et le meilleur. On peut croiser des gens avec un fusil dans leur voiture, et pour autant, pour 12 $, on campe sur un grand emplacement boisé mais pas trop, avec des douches et de l’eau courante et potable. Pour ce prix-là, au Yukon, c’est toilettes sèches et tu fais bouillir ton eau… Le seul truc, c’est que les Américains sont au top de la technologie, et dans les camping fédéraux, il faut réserver à l’avance par Internet, ou par téléphone. Nous, on est tout sauf à la pointe de la technologie, on ne savait pas qu’il fallait réserver, on n’a pas de téléphone, et pas plus Internet. Et pas moyen de payer en liquide. Mais la dame du camping est vraiment très gentille et nous laisse nous installer sur un emplacement en nous disant qu’un ranger viendra demain pour la réservation. Le lendemain, comme promis, on vient nous voir pour nous prêter un téléphone et nous permettre de réserver pour les trois nuits suivantes. Une fois ce petit détail réglé, nous pouvons nous rendre compte de ce qui nous entoure : le camping donne directement sur le plus gros glacier de la région : le glacier Mendenhall. On ne le savait même pas. Le paysage est saisissant. Nous prévoyons marcher demain sur un sentier qui le longe par le côté ouest, d’où nous pourrons probablement profiter de la vue. Et c’est le cas. Après une montée de 5 km, nous atteignons un point de vue magnifique. On retrouve un peu les émotions ressenties en Amérique du Sud.


Les deux jours qui ont suivi ont été plutôt tranquilles : une journée citadine (on a cherché un lave-auto, en vain) pour changer, et une journée kayak le matin/marche de l’autre côté du glacier l’après-midi. Il est déjà temps de repartir : on prend le traversier à 7 h le lendemain, et il faut être au terminal à 5 h. La nuit sera courte.

Retour à Haines en fin de matinée : nous allons directement au camping du lac Chilkoot. Le lac – et surtout la rivière du même nom – est connu pour la présence de grizzlis à la fin de l’été. Ils viennent y pêcher lorsque les saumons remontent pour frayer. C’est un peu tôt dans la saison, mais on nous a dit que quelques-un s’étaient déjà montrés. On croise les doigts… En attendant, on trouve un emplacement et là, génial, on peut payer sur place. Manque de bol : ils n’acceptent que le liquide. Bons nord-américains que nous sommes, nous n’avons jamais de liquide sur nous, on paye tout par carte. Et encore moins des dollars américains. Alors c’est reparti, nous allons voir la personne qui s’occupe du camping pour lui dire qu’on ne peut pas payer et qu’on reviendra plus tard avec l’argent. Pas de problème! Direction la ville pour faire un peu de tourisme et retirer des dollars. D’abord le tourisme. Stéphane veut absolument acheter le whisky fabriqué sur place, ce qu’il n’avait pas pu faire l’an dernier : c’était fermé. Nous tentons donc notre chance et nous rendons sur les lieux. C’est ouvert! On n’y comprend rien, c’est le 4 juillet, fête nationale et jour férié, et tout est ouvert. Comme quoi, avec les Américains, il faut s’attendre à tout. Bref. Donc, on trouve la distillerie, Stéphane fait ses emplettes (sans goûter au préalable, la vendeuse le félicite…). Espérons qu’il ne sera pas déçu. Après cela, nous n’avons plus grand-chose à faire, alors nous allons prendre un café et décidons d’aller marcher jusqu’à la plage sur le sentier que nous avions découvert l’été dernier pour terminer l’après-midi. Après une petite baignade enfumée, nous repartons pour le camping pour la soirée. En chemin, nous faisons une bien belle rencontre. Heureusement que Stéphane a l’œil, nous aurions facilement pu passer à côté sans nous en apercevoir.


Après le repas, nous allons nous promener au bord de la rivière. Pas de grizzli ce soir, mais un magnifique coucher de soleil sur le lac. Nous ne sommes pas déçus!
Pas de grizzli la veille, on nous explique qu’il est peu probable que nous en voyions pêcher. C’est très tôt dans la saison, et comme il fait chaud cette année, les bleuets sont déjà mûrs et les ours préfèrent se concentrer là-dessus et revenir à la rivière à l’arrivée des saumons. Mais celui qui se trouve sur la plage ce matin nous satisfait amplement. Il profite de la marée basse pour ramasser des moules et des coquillages et nous, on en profite pour l’observer. On ne se lassera jamais de ce spectacle.

Après avoir bien profité du spectacle, nous décidons enfin de nous remettre en route pour le Mont Ripinsky, la rando du jour. Une belle petite ascension de 900 mètres de dénivelé : aïe aïe aïe, les jambes. Mais c’est super joli et varié : forêt humide en bas, près alpins en haut et sur la crête, une vue imprenable sur les montagnes, les glaciers et la mer. Dommage que la fumée nous empêche d’en profiter, hé hé. On se sera quand même fait une belle idée, et nous nous serons bien dépensés, de quoi mériter la bière de la micro-brasserie locale. Celle-là aura été très attendue, car après deux tentatives, l’établissement était enfin ouvert et nous avons pu profiter de la terrasse pour la déguster. Et de cette chaleur, ça requinque. En plus, nous ne nous sommes pas fatigués pour rien : c’était vrai, les bleuets sont en avance. Nous avons pu faire notre première récolte de l’année. Avec un super yaourt fermenté végane (genre fromage blanc) découvert sur place, le dessert était tout trouvé!


C’est le moment du départ, l’avant-dernier jour des vacances. Et oui, toutes les bonnes choses ont une fin. Après une bonne nuit, on lève le camp : retour au Canada. Nous avions pensé randonner en chemin sur un sentier que nous avions découvert à l’aller, mais il fait très chaud, et on a mal aux jambes. Nous poussons donc jusqu’au parc Kluane où nous passerons la nuit, après l’incontournable promenade au lac Kathleen. Une fois n’est pas coutume, il n’y a pas de vent, ce qui nous permet de profiter des lieux. Certains se baignent, nous nous contenterons de tremper les pieds.
C’est ainsi que se termine notre périple. Nous nous réveillons dans une fumée encore plus épaisse que les derniers jours. On ne voit même plus les montagnes. C’est donc sans regret que nous prenons la route en direction de Whitehorse, non sans le petit arrêt traditionnel à la boulangerie de Haines Junction pour un petit café et terminer les vacances en beauté. Des vacances qui resteront gravées dans notre mémoire… et sur Étienne!
